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Récupération transfrontalière de chaleur industrielle : Calorie Kehl-Strasbourg

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Im Vordergrund sind die auf einer Rheininsel gelegenen Badischen Stahlwerke zu sehen. Hinter den Stahlwerken fließt die Kinzig, davor erstrecken sich die Becken des Kehler Rheinhafens. Jenseits der Bildmitte fließt der Rhein. Auf der Straßburger Rheinseite ist der dortige Rheinhafen zu erkennen; dahinter das Stadtgebiet mit der hoch aufragenden Spitze des Münsters.
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Les aciéries Badische Stahlwerke se situent sur une île du Rhin, en face la ville européenne Strasbourg avec son port du Rhin. | Crédit photo : Stadt Kehl/Raphael Hild
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À la frontière entre l’Allemagne et la France, dans la région de Kehl-Strasbourg, un projet phare de coopération transfrontalière dans le domaine de la récupération de chaleur décarbonée voit le jour. Dans un premier temps, 7 000 foyers de part et d’autre du Rhin seront approvisionnés en chaleur fatale provenant d’une aciérie à Kehl : un parfait exemple de développement durable et de coopération transfrontalière.
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Par Sabine Schimetscheck de Calorie Kehl-Strasbourg

Dans la zone portuaire rhénane de Kehl est implantée depuis plus de 55 ans la Badische Stahlwerke, une entreprise dans laquelle de la ferraille est transformée en acier, principalement destiné à l’industrie du bâtiment. Un cycle qui peut être répété à l’infini et qui libère d’énormes quantités d’énergie. L’idée du projet de la Calorie Kehl-Strasbourg consiste à utiliser cette énergie renouvelable pour le chauffage urbain.

Lors de la production d’acier, la chaleur fatale est générée dans des fours à arc électrique où la ferraille solide est fondue à des températures de l’ordre de 1650°C. La chaleur ambiante des fours et des fumées est alors conséquente. Ce procédé industriel exige que la chaleur résiduelle soit extraite des fours, puis refroidie par des circuits d’eau. Les fumées ainsi refroidies sont ensuite évacuées. L’idée de la Calorie Kehl-Strasbourg consiste donc à récupérer la chaleur extraite des circuits de refroidissement et de l’acheminer vers le réseau de chaleur de Strasbourg, à travers un réseau d’interconnexion qui reste à construire. Avec une puissance moyenne de 20 MW, il est prévu de récupérer, dans un premier temps, 70 GWh par an, ce qui correspond au besoin en chauffe de 7 000 ménages. 

Pour commencer, d’importants travaux de restructuration sont nécessaires dans l’aciérie afin de pouvoir extraire l’énergie. Parallèlement, un réseau de canalisations doit être construit pour acheminer la chaleur vers les clients potentiels.  

Du côté allemand, ni la zone industrielle proche du port ni la ville de Kehl, située à trois kilomètres, ne présentent de besoins suffisants pour de telles quantités de chaleur. De l’autre côté du Rhin se trouve Strasbourg - une ville qui exploite déjà de grandes installations de chauffage urbain et qui souhaite davantage les développer ce qui fait d’elle un partenaire idéal. Pour relier les installations des deux villes, une traversée du Rhin est nécessaire : un défi technique en soi, amplifié par les différences en matière de normes et de contraintes juridiques des pays respectifs, ce qui pourrait constituer une barrière. Une barrière que ni le projet transfrontalier ni le changement climatique ne connaissent. 

En vue de réaliser leurs objectifs en matière de politique climatique, Kehl et Strasbourg ambitionnent des réseaux de chaleur complètement décarbonés : un objectif identique des deux côtés du Rhin pour lequel les deux villes travaillent désormais, ensemble.

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Sur un convoyeur qui remplit l’image, des billettes d’acier de section carrée sont transportées sur des rouleaux à travers l'aciérie. Les billettes sont incandescentes.
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Il faut chaud dans l’aciérie : même les billets d’acier dégagent encore beaucoup de chaleur dans l'air ambiant. | Crédit photo : Stadt Kehl/Annette Lipowsky
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C’est dans ce contexte et pour ce projet transfrontalier unique en Europe, qu’a été créée par les partenaires français et allemands la Calorie Kehl-Strasbourg.  

Le cadre juridique choisi est celui d’une Société d’Économie Mixte transfrontalière. Cette forme d’entreprise de droit français, qui requiert une participation minimale d’associés privés, permet aux collectivités territoriales des deux pays d’apporter le capital social et de porter ainsi le projet en commun. Outre l’Eurométropole de Strasbourg et la ville de Kehl, le Land de Bade- Wurtemberg et la Région Grand Est participent à la société. La Banque des Territoires intervient en tant que partenaire privé, les Badische Stahlwerke détiennent également une action symbolique.  

La SEM Calorie Kehl-Strasbourg bénéficie d’un soutien financier, via le programme Interreg de l’Union européenne, qui subventionne la société à hauteur de 2 millions d’euros.  Des subventions sont également envisagées pour le projet : l’ADEME française et le BMWK/BAFA allemands souhaitent s’impliquer via leurs programmes de soutien de la transformation énergétique. 

Les premières études de faisabilité et études préliminaires, notamment en ce qui concerne le tracé, ont été réalisées. Actuellement, une procédure d’appel d’offres à l’échelle européenne est en cours, dont l’objectif est de confier la conception du projet transfrontalier à une équipe d’ingénieurs. Leur travail débuterait en mai de cette année. En 2025, le tracé définitif devrait être connu et les travaux devraient débuter, en sorte que le réseau puisse être mis en service fin 2027. C’est un calendrier ambitieux, dont le respect ne sera possible que grâce à un engagement important et à une bonne coopération interculturelle de toutes les parties prenantes.  

La Calorie Kehl-Strasbourg suscite déjà aujourd’hui un intérêt bien au-delà du territoire Strasbourg-Kehl et doit être considérée comme un modèle exemplaire de coopération transfrontalière et d’innovation dans le domaine de la transition énergétique. Sabine Schimetschek, directrice générale de la Calorie, apporte non seulement son expérience dans les domaines de l’ingénierie civile et de la gestion de projet, mais elle incarne également l’esprit du projet à travers une longue expérience de vie et de travail en Allemagne et en France. Elle saura valoriser les différences culturelles entre les partenaires au bénéfice de l’objectif commun.  

Basé sur la volonté et la nécessité d’une décarbonation des énergies et de viser la souveraineté énergétique, la Calorie Kehl-Strasbourg permettra d’alimenter, comme il a été dit, environ 7 000 foyers et d’économiser ainsi près de 19 600 tonnes de CO

En ces temps d’incertitudes et de défis écologiques croissants, l’urgence d’une solidarité européenne dans le domaine de l’énergie et de la protection du climat semble importante et urgente. 

En prenant l’exemple de l’utilisation transfrontalière de la chaleur fatale, la Calorie montre que l’idée d’une politique énergétique européenne intégrée, basée sur la coopération, l’innovation et la durabilité, est possible. « Avec Calorie Kehl-Strasbourg, nous aurons demain le plus grand réseau européen transfrontalier de coopération énergétique », indique Jeanne Barseghian, maire de Strasbourg et présidente de la Calorie. Elle poursuit : « Ce partenariat inédit avec nos voisins et amis Allemands doit servir d’exemple pour façonner l’Europe du climat. »