La sobriété, ça ressemble à quoi ?
Par Marion Davenas
Autrefois réservée aux cercles spirituels ou militants critiques de la société de consommation, elle est aujourd’hui utilisée de plus en plus fréquemment dans la sphère politique – le 14 juillet 2022, le président Emmanuel Macron appelait le pays à « entrer collectivement dans une logique de sobriété » pour faire face au risque de pénurie liée à la guerre en Ukraine.
En Allemagne, le terme équivalent de Suffizienz semble être encore largement réservé aux sphères académiques et écologistes. Pourtant, un nombre croissant de publications investissent ce concept pour questionner notre consommation des ressources planétaires à l’aune de nos besoins. Sans porter l’étiquette de « Suffizienz », de nombreuses annonces et mesures politiques récentes vont dans une direction similaire du côté allemand.
Alternative à « l’ébriété », la sobriété se développe en réaction aux excès de l’hyperconsommation. « Ni manque, ni excès » : les avocats de la sobriété questionnent nos modes de vie et d’organisation par la distinction entre l’utile et le superflu. Par cette recherche d’un équilibre entre besoin et luxe, la sobriété porte intrinsèquement une exigence de justice sociale. La modération ne peut être demandée qu’à celles et ceux qui surconsomment – aux autres doivent être assurées les conditions du « bien vivre ».
Penser la sobriété ouvre donc un débat complexe sur la nature de nos besoins et invite à interroger l’utilité sociale de toute consommation de ressources. Loin d’être réservée à la sphère individuelle, cette démarche s’impose au niveau collectif.
De nombreuses municipalités françaises et allemandes prennent déjà des mesures concrètes pour réduire leur usage des ressources et favoriser des comportements citoyens plus sobres. C’est le cas de Lyon, qui a décidé en juin 2022 l’interdiction des bâches publicitaires, des vitrines allumées la nuit et des publicités près des écoles. C’est le cas aussi de Hiddenhausen, qui subventionne l’achat et la rénovation de maisons existantes pour lutter contre l’étalement urbain.
Comme elles, de nombreuses collectivités s’engagent vers plus de sobriété dans des domaines aussi variés que la mobilité, l’énergie, le foncier ou le logement. Quelles pistes suivent-elles ? À quels obstacles sont-elles confrontées ? À quoi ressemble, concrètement, une politique locale de sobriété ? C’est ce que le Forum pour l’avenir explore actuellement, au plus proche des acteurs locaux de la transition.
En savoir plus
- Le 29 juin, Michaela Christ, sociologue à l’Université de Flensburg, nous parlait des chances et limites des politiques territoriales de sobriété dans le cadre de nos Cuisines de la transformation.
- Les 13 et 14 octobre, nous avons permis aux collectivités françaises et allemandes d’échanger sur leurs pratiques de la sobriété dans l'aménagement urbain. Le domaine du logement était au cœur de nos discussions.